lundi 11 septembre 2006

Sur les patrons et 2007, l’héritier impérial japonais et cette présidentielle meurtrière

L’intrusion des économistes et du MEDEF dans le débat politique est stupéfiante. Alors que tous les syndicats refusent de se positionner officiellement dans le débat présidentiel, nous avons eu deux prises de positions étonnantes. Tout d’abord, donc, celle du cercle des économistes avec en figure de proue, JH Lorenzi, sur ce qu’il faut faire, et ensuite celle annoncée du MEDEF sous la forme d’un livre blanc qui devra dire aux Français et aux forces politiques, ce qui est démagogique et ce qui ne l’est pas.

Les commentateurs une fois encore ne bronchent pas, tendent les micros et font juste chambre d’échos, sans critique de ce qui est énoncé. Pourtant ce qui se passe est tout bonnement hallucinant. Des gens décrètent que la réalité est entièrement économique de part en part. Plus de problématique sociale ou politique, dont l’économie serait la conclusion ou le bras armé. Ils rétablissent l’aristocratie dans ce pays. En fait, il faudrait un gouvernement des économistes car la réalité coïncide avec l’économie. Ils me font penser à Platon qui disait que la cité idéale implique une hiérarchie et un ordre, et que la classe des philosophes était destinée à commander car ils expriment la raison, connaissent la justice en soi et représentent l’esprit. Platon a développé ensuite des vues intransigeantes, fondées sur l’absolu, intolérantes et en fait utopiques. Les économistes sont brillants dans l’analyse du passé et la compréhension des mutations. Ils sont nuls en prospectives. Ils ne comprennent jamais les innovations car elles rendent toutes compte de destructions créatrices. Pour qu’un monde s’avance, à première vue un ordre meurt. Or le futur, c’est le territoire de la prospective politique.

Les grands patrons rentrent en force dans le débat politique en vue de 2007. Certains le font en tant que citoyens engagés, c’est courageux et bien venu. D’autres le font en tant que patron connaissant donc les besoins de l’économie, ceci demande débat. Depuis des années, les entreprises, du moins les grandes, celles qui sont cotées, mais ce sont souvent les patrons de celles-ci qui parlent, perdent leur territorialité et leur origine. Ils sont dans un monde globalisé qui a ses lois et ses règles. Ces patrons là, entrent dans un débat national. Mais parlent-ils au nom des entreprises françaises quand ils parlent, ont-ils comblé la distance que crée leur fonction au regard de la France, et sont-ils bien sûr de la concordance de leur dires avec l’intérêt national ? Ils représentent qui ? Ont-ils conscience du fait qu’ils ne sont peut être pas porte-parole de ce qu’ils croient. Non pas qu’ils ne souhaitent pas l’intérêt national, mais pris dans leur fonction et dans ce qu’ils pensent être bien pour l’entreprise, ils en oublient un peu de bien évaluer l’intérêt des PME françaises. Et là, on retombe dans les problèmes que pose la démocratie d’opinion, vers qui se tendent tous ces micros ? Sont-ils les bons représentants de l’entreprise ? Moi je pense que c’est un peu comme si on interrogeait Johnny sur les problèmes de peer to peer, Universal au nom des indépendants.

Autre sujet de communication intéressant, le fils héritier qui est enfin offert à l’empire japonais. On parle d’effet sur l’économie et de cohésion sociale renforcée. Ridicule ? Pas sûr. Ce sujet touche deux notions sociologiques, la natalité d’abord. Enigme sociologique s’il en est. Pourquoi la France est-elle sur un taux de 2,1 et l’Espagne sur 1,5 ? Personne ne peut l’expliquer. Les sociologues parlent toujours d’un mix complexe fait de conditions économiques et d’appréhension du futur. En fait, ils reconnaissent tous qu’excepté les périodes de guerre, on ne sait pas. Tout ce qui touche à l’enfant est donc très symbolique, dans le champ personnel et non collectif. Second sujet, ce qui fonde le bonheur collectif et l’enthousiasme économique. Pourquoi la coupe du monde de 1998 en France met-elle l’économie en action, pourquoi l’Angleterre cesse t-elle d’exister durant les jours qui suivent la mort de Diana, pourquoi le fils du prince au Japon ? Nous avons déjà parlé ensemble de la société post moderne. Dans cette société d’opinion, tout se vaut. Très peu de vecteurs forts font consensus, il y a des vecteurs partout sur lesquels des gens qui savent dissertent et donnent des avis. Ces avis se contredisent souvent. On ne sait plus lire la société dans ses remous car on fuit ce qui ferait consensus, toutes ces zones qui nous rapprocheraient, pour exprimer ses différences. Ce monde est si peu sûr, qu’il faut être une « personne », un masque, une marque pour y subsister, une époque où les gens sont en concurrence les uns les autres, comme des marques.

Dans ce cadre, c’est un atout merveilleux que d’avoir comme actif un passé. C’est une arme extrême, que de pouvoir l’activer à un moment donné. Ce passé a un pouvoir symbolique fort, dégagé de la vulgate politique ou sociologique, ce symbolique devient agissant car il lie les gens ensemble et leur donne la possibilité de pouvoir enfin baisser les armures. Arrêter de jouer un rôle, être sûr de pouvoir désarmer car tout le monde désarme.

Autrement, la France réactionnaire est en route. Le duo Royal-Sarkozy s’installe et s’impose. L’un comme l’autre casse les modèles existants dans chaque camp. La carte scolaire pour l’une, la France de mai 68 pour l’autre. Tous les deux sont mus par la même haine de ce qui les précède. Quel que soit le vainqueur, la gueule de bois sera terrible. A gauche, un PS détruit n’existant plus qu’en tant qu’officine de placement d’un candidat à l’élection. Comment s’expliqueront-ils que tous se seront précipités vers celle qu’ils détestaient, méprisaient, celle qui n’arrivait pas à rassembler deux personnes pour faire un courant et se présenter au congrès. Ils ont voté un projet, elle le fait exploser, sur les 35 heures, sur la carte scolaire. Au congrès de Dijon, la motion de JM Bockel sur le Blairisme fait 3 %, ils suivent quelqu’un qui reconnaît du talent au garçon. A droite, un parti présidentiel conçu pour être le rassemblement de toutes les familles et qui va se retrouver encore plus au service d’un homme que ne le fut jamais le RPF ou l’UDR. Une droite qui croit élire un des siens, donc social, anti-atlantiste et anti-communautaire, et qui croit à quelque chose. Elle va se découvrir un homme dont les convictions sont changeantes au grès des moments et qui maltraite son image de dur. Travailliste social à Agen il y a deux semaines, libéral au MEDEF la semaine dernière, inventeur du CPE puis exécuteur testamentaire de ce dernier, contre la double peine, et Cachan.

Pourquoi, pourquoi la réalité de l’un comme de l’autre est-elle illisible ? Elle a eu un été meurtrier, ne parle pas de la violence en Corse, offre un emploi à son entartreur le jour de la conférence du Liban, rate son discours à Frangy, refuse le débat à La Rochelle, zappe ses mesures phares lors d’un discours sur l’école. Lui, parle aux jeunes alors qu’il ne l’a jamais été, nous offre Johnny et Doc Gyneco, se contredit à Agen et à Jouy, l’important n’est pas là. On ne se bat plus contre les couvertures des magazines et l’image. On récolte les fruits de ces sketches qui nous faisaient tellement rire. Coluche et son « tout pour un, tous pourris ». Il faut punir les sortants. L’image permet cette distance qui fait que l’on projette tout sur une personne, sans savoir si ces projections sont les bonnes puisque l’autre ne répond pas et ne débat pas, ou gesticule de manière contradictoire.

La critique est inaudible, c’est une vieille histoire. Au procès de Socrate, nous vivons la première indignation contre ce qui fonde la démocratie d’opinion. Mais sa cause n’était pas la bonne. Socrate à travers la narration du procès par Platon et sa bande, ses dialogues avec Criton Euthypron, c’est la première tentative de subordination de la politique à la métaphysique. Hélas, la critique est pervertie par ce qui y existe d’intégrisme, et Aristote en avançant dans le sensible et en bousculant les conventions va nous éclairer plus tard. La faiblesse de la critique aujourd’hui réside dans la difficulté à mettre en opposition le candidat vertueux dans un camp et dans l’autre. Il nous faut trouver Aristote. Chaque camp ayant de mon point de vue de meilleurs candidats, mais l’époque exige la merveille du monde, ou ces deux là.

Par Philippe Lentschener, lundi 11 septembre 2006.

Posté par le 11 septembre 2006
Société
Lire les commentaires > Commentaires : 5

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[+/-]  Le 12 septembre 2006 - 23:55 jean-pierre prud'homme a dit :

ce que je retiens des textes socratiques platoniciens, c'est que quand la rhéthorique prend le pas sur le "partage"*, la tyranie n'est pas loin. (cf. Platon, Aristote,.., Descartes,..., Diderot, ..., Heidegger, ..., pour ne citer que les plus "médiatiques"

* "nemein"

[+/-]  Le 13 septembre 2006 - 15:01 Jacques Dyuit a dit :

C'est pour cela que la philo éxiste, prendre ce qui nous éleve et savoir séparer le bon grain de l'ivraie.
Doit on condamner une oeuvre au nom de déviations ? Heidegger ne vaut il pas tellement plus que trois années d'errements?

[+/-]  Le 14 septembre 2006 - 23:10 JPPH a dit :

Jacques,
Je ne condamne pas !
Simplement : l'épuisement rhétorique sadien qui pourrait occuper le manque de marges ou de "no man's land" entre les frontières de la modernité, de la postmodernité, voire de l'hypermodernité, m'épuise.. et particulièrement dans les domaine de la communication, du marketing, et de "l'art"!

En l'occurence, ce qui m'importait, ce n'était pas la fascination heideggerienne à une époque donnée... Proustien je suis, proustien je le demeure (je te revoie au "contre Sainte Beuve"). Heidegger m'a ouvert assurément comme pour toi, d'autres horizons.. voire m'a provoqué dans l'art de l'"aphorisme" (cf . l'étymologie de ce mot)
Par exemple, ce qu'il a écrit sur Hölderlin dans une période des plus tragiques m'émeut (encore une fois, entre "émoi" et émotion", voir l'étymologie des mots)...
Je me permets, dans le décousu de mon envoi, Jacques, de te renvoyer à l'oeuvre de Günther Anders (mais aussi à sa determination ainsi qu'à son humilité) : Günther Anders, qui aura été un "élève" de Heidegger et "fait" intéressant, le premier mari de Hannah Arendt : http://fr.wikipedia.org/wiki/G%C3%BCnther_Anders

[+/-]  Le 15 septembre 2006 - 14:41 françois detrème a dit :

Bonjour. Puis- je me permettre d’intervenir et proposer une "dispute" (pardon pour Platon mais au sens strict du terme) sur le sujet de l'intérêt de ces notions. Je pense que, oui, il est important que la communication se pose ces questions. Si on ne comprend pas que nous passons de l'individu à la personne, que le masque de Boece est la règle aujourd'hui, que la frénésie identitaire est la quête, que cette quête est vaine, que les racines sont désormais redéfinies et travaillées par les gens!!!! Que l’on sort de trois siècles ou le progrès est l’idée, que le travail glorifié par Kant n’est plus l’horizon, que la post modernité gomme passé présent futur, peut on travailler sans avoir les yeux ouverts ?
Il faut faire, je crois, et je dis cela sans agressivité aucune, attention aux posts ambigus. En effet, il est bon que des espaces existent pour parler de ces choses. Et celui ci n'est sûrement pas pire que les autres, voire il est mieux. Ou irait- on dans la comm ? Faut- il lire Stratégies ?
Moi en tous cas, je ne vis pas cela comme Sadien. Nous avons besoin de réflexions, et franchement, l'homme doit- il renoncer à marier la philo et la communication ? J'y vois une résistance en fait à l'idée que les gens de médias puissent s'aventurer là. Ils sont indignes. Deleuze et Guattari ne sont pas loin. Un agent d'assurance, un lunettier, un médecin, etc; Oui. Cela peut donner Kafka, Kant, Kirkegard, Freud, mais la comm non. Moi je travaille aux frontières de ces métiers et cela ne me gène pas.
A l'époque des sondages que quelqu'un rappelle qu'Heidegger a dit il y a un siècle que seul ce qui serait chiffre compterait, que l'on parle de Pythagore c'est bien non ?
Amitiés à tous.

[+/-]  Le 6 juillet 2007 - 1:58 rape sex movies a dit :

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